Alors que la rentrée scolaire approche, le département du Sud-Est fait face à des défis considérables, exacerbés par les répercussions de l’insécurité nationale. Bien que cette région soit relativement moins affectée par les violences des gangs comparée à l’Ouest et l’Artibonite, les conséquences économiques de cette insécurité pèsent lourdement sur les familles. Les routes principales menant au Grand Sud, régulièrement bloquées ou soumises à des péages illégaux, perturbent le transport des biens essentiels et augmentent drastiquement les coûts.
Cette situation, combinée à une inflation galopante et à la rareté du carburant, rend les préparatifs de la rentrée scolaire extrêmement difficiles pour les parents du Sud-Est
Les barrages routiers et les points de péage imposés par des groupes armés sur les routes du Grand Sud affectent directement les prix des biens de consommation, y compris les fournitures scolaires. Le coût des cahiers, livres, uniformes et autres articles nécessaires à l'éducation a augmenté. Cela s’ajoute aux frais de scolarité que de nombreuses familles peinent déjà à payer, réduisant leurs capacités financières et compromettant la possibilité pour leurs enfants de retourner en classe.
Des parents interrogés ont exprimé leur désarroi face à cette situation. Ils expliquent que les prix ont augmenté par rapport aux années précédentes, et que le coût du transport, aggravé par la crise du carburant, est devenu insoutenable. Pour certains, il n'est plus possible d'envisager l'achat des fournitures de base nécessaires à la rentrée. Plusieurs familles s'inquiètent également de ne pas pouvoir payer les frais de scolarité cette année, ce qui pourrait priver leurs enfants d’une année scolaire.
Les enseignants, quant à eux, ne sont pas épargnés par la crise. Dans le Sud-Est, beaucoup de professeurs sont non nommés, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas encore été officiellement inscrits sur les listes de paie de l’État, malgré parfois plusieurs années de service. Cela signifie qu’ils travaillent sans recevoir de salaire régulier, aggravant leur situation de précarité. En l’absence de revenus stables, certains enseignants sont contraints de chercher des emplois supplémentaires pour subvenir à leurs besoins, ce qui affecte leur capacité à se consacrer pleinement à leur mission éducative.
Cette réalité a des conséquences directes sur la qualité de l’enseignement. Les écoles, notamment dans les zones rurales, peinent à maintenir leurs équipes enseignantes, et le manque de ressources pédagogiques s'ajoute aux défis liés au fonctionnement même des établissements scolaires. La précarité des enseignants affaiblit tout le système éducatif dans le département, et cette situation risque de se détériorer si des solutions ne sont pas rapidement mises en œuvre.
La pénurie de carburant continue d'aggraver la crise. Non seulement le coût du transport a explosé, mais certaines zones rurales sont de plus en plus isolées, rendant l'accès aux écoles encore plus difficile. Les parents doivent non seulement faire face à des coûts accrus pour le transport de leurs enfants, mais aussi pour acheter des fournitures, souvent disponibles uniquement en ville. La rareté du carburant limite également les déplacements des enseignants, qui peinent à se rendre dans leurs écoles, aggravant encore plus la situation.
Face à ces défis pressants, l'Association Bon Chemin par le Livre et l'Outil (ABOCHEM) propose une série de mesures pour atténuer les effets de la crise et permettre une rentrée scolaire plus sereine dans le Sud-Est. Ces propositions visent à répondre tant aux difficultés financières des parents qu’aux problèmes systémiques du secteur éducatif :
1) Subventionner les écoles privées en difficulté : De nombreuses écoles privées risquent de fermer en raison du non-paiement des frais de scolarité par les familles. ABOCHEM suggère que des subventions gouvernementales ou des fonds d’urgence soient alloués à ces établissements pour éviter leur fermeture et garantir que les enfants puissent continuer leur scolarité.
2) Mise en place de mesures socio-économiques pour soutenir les familles : ABOCHEM propose l’instauration de programmes d’aide financière directe pour les parents, afin qu’ils puissent subvenir aux besoins éducatifs de leurs enfants. Des allocations spécifiques pour les fournitures scolaires, les uniformes et le transport devraient être envisagées pour alléger le fardeau financier des familles.
3) Rétablissement de l’ordre constitutionnel : La crise politique actuelle exacerbe les problèmes économiques et sécuritaires du pays. ABOCHEM appelle à un retour rapide à l’ordre constitutionnel pour stabiliser le pays, rétablir la confiance et permettre un fonctionnement normal des institutions publiques, y compris dans le secteur éducatif.
4) Réprimer l'insécurité et restaurer la libre circulation : ABOCHEM insiste sur la nécessité pour l’État de reprendre le contrôle des routes menant au Grand Sud. Cela permettrait de rétablir la libre circulation des biens et des personnes, facilitant ainsi l’accès aux fournitures scolaires et réduisant les coûts de transport.
La crise que traverse le département du Sud-Est à l’approche de la rentrée scolaire est le reflet des difficultés généralisées qui affectent l’ensemble du pays. L'insécurité, les problèmes économiques et la précarité des enseignants rendent l'accès à l'éducation de plus en plus difficile.
L'Association Bon Chemin par le Livre et l'Outil espère que des mesures urgentes seront prises pour améliorer les conditions d’enseignement et d’apprentissage. Il est essentiel que le droit à l’éducation, fondamental pour l’avenir des enfants haïtiens, soit préservé, malgré les crises multiples qui secouent le pays. Seule une réponse collective et organisée permettra de garantir que les élèves du Sud-Est, comme ceux du reste d'Haïti, puissent reprendre leur scolarité dans des conditions dignes et sécurisées.
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